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JOURNAL DE MONSIEUR MURE.

où l’on voit nettement en soi. J’avais le cœur gros. Des tentations me prenaient : là, dans l’ombre, me prosterner à ses pieds, baiser le bas de sa robe, lui demander pardon ! Pardon de l’avoir aimée et de m’être trompé, et d’avoir causé le malheur de sa vie en contribuant à lui faire épouser l’homme qu’il ne lui fallait pas, l’homme qui ne convenait qu’à mon inconsciente jalousie, à mon égoïsme.

Déjà, mes lèvres s’entr’ouvraient :

— Hélène !… Hélène !

Mais elle poussa un petit cri :

— Ah !

Et elle ajouta gaiement :

— Vous ne voyez pas ? Mais débarrassez-moi donc…

C’était une branche de noisetier accrochée à ses cheveux. Puis, elle parla encore. Ils avaient grand besoin d’être taillés, ces noisetiers ; tout ça était médiocrement entretenu ; elle songerait à faire venir le tailleur d’arbres. Elle n’aimait pas non plus ces fines toiles d’araignée que l’on se sentait tout à coup sur la figure, en travers de ces allées où nul n’avait passé de tout l’hiver. Même elle pensait à des embellissements. Ici, une serre ferait bien. Il fallait absolument agrandir la petite pièce d’eau, changer la rocaille… Et chacune de ses phrases était pour moi un calmant et un baume. Je sentais mon cœur se dégonfler. Elle s’accoutumait donc à son sort ! Plus de résolutions extrêmes à redouter de sa part. Mon