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LES FEMMES DU PÈRE LEFÈVRE.

Puis, désignant Boulotte, faisant le geste de palper à mains pleines :

— Quelle poitrine !

Maintenant M. Lefèvre le leur disait sans détours, où il avait recruté ses femmes.

— Je m’étais d’abord bercé de l’espoir d’amener tout le corps de ballet du Grand-Théâtre.

Mais deux ou trois Coqs de son état-major ouvraient seuls de grands yeux. Il avait beau élever la voix :

— Ni actrices, ni femme du monde, ni grandes lorettes !… Il eût fallu, mes amis, des capitaux considérables… Un autre à ma place se fût découragé : moi, je me rabattis sur l’Eldorado

Plus d’oreilles complaisantes pour écouter M. Lefèvre ! Cet Eldorado était pourtant un établissement remarquable, à la fois bal public et café-concert, rendez-vous de toute la basse prostitution de M… : filles en carte, rouleuses et traînées. Là, plusieurs soirs de suite, M. Lefèvre avait dû se livrer à des pourparlers bien intéressants, endoctrinant à la sortie les beautés qui s’en allaient bredouille, prêchant leur bal comme Pierre-l’Hermite prêcha la première croisade. Mais, la foule des Coqs ne se souciait plus de lui, maintenant, comme un enfant qui tient tout à coup un autre jouet.

Camélia venait de casser un verre. Thérèse, Augustine, Louise, leurs chaises rapprochées, discutaient quelque chose, toutes les trois à la fois. Et la