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LES FEMMES DU PÈRE LEFÈVRE.

Mail ce jeudi-là, de deux à quatre. Et pas un Coq non plus à la gare ! Le petit omnibus jaune-paille de l’Hôtel de Paris avait beau passer, enfonçant jusqu’à mi-roue dans des flaques, crotté jusque sur la bâche. À quoi bon venir patauger dans cette purée plus délayée et plus profonde aux abords de la gare, un bas-fond par rapport à la ville.

— Ils ont joliment raison ! disait à un employé la vieille marchande de journaux, l’invitée de Mauve, exhaussée ce jour-là sur d’énormes sabots.

D’ailleurs, où se tenaient-ils, les Coqs ? Pas plus dans les cafés, qu’au cours de Droit Romain ou de Code Napoléon. Tous dans leur lit, peut-être, engourdis, écrasés, humiliés, n’osant pas plus se montrer que Courcier, de Paris, ou Jéror, d’Alger. Et la ville entière semblait morte, plus morte que pendant les vacances, lorsque l’écriteau « chambre à louer » pendait à la fenêtre des chambres garnies.

Vers le soir seulement, le Mail prit un aspect inaccoutumé. Il ne pleuvait plus. Les parapluies des passants se fermèrent. Une bise glacée durcissait déjà la boue.

Cela commença par une bande de gamins soufflant dans un vieux cor-de-chasse à la hauteur de la fontaine du Bon-Grand-Homme. À l’appel de cette musique éraillée de Mardi-gras, un attroupement se forma, grossit vite. Des cercles et cafés, des vieux hôtels noircis par le temps, de diverses rues voisines, il arriva des gens, toute sorte de gens : une