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LES FEMMES DU PÈRE LEFÈVRE.

depuis le soir où, à Paris, ses « convictions » lui avaient : fait siffler Henriette Maréchal à côté de « l’illustre Pipe-en-Bois ». Et, jusqu’à la fin du cours, il lut avec une attention profonde les Demoiselles de magasin de Paul de Kock.

Malgré ces efforts de tenue et ces frais de toilette, à la sortie du cours, la délicate négociation entreprise par Jéror, d’Alger, et Courcier, de Paris, échoua. Les deux trésoriers du bal eurent beau s’attacher au talon des bûcheurs sur la place de la Faculté, et dans les rues voisines. Appels à l’esprit de corps, protestations de camaraderie, familiarité chaleureuse, essais de tutoiement, rien n’entama la carapace glacée de ces jeunes hommes sérieux. Ah bien, oui ! comme s’ils allaient donner leurs cinq francs pour un bal, eux, lorsqu’avec cinq francs on pouvait acheter un volume de Demolombe. Qu’est-ce que ça leur faisait, à eux, que le cafetier des Quatre-Billards offrît la salle et que le père Lefèvre fût déjà parti ? Leurs yeux rétrécis restaient un moment ronds et fixes, à ces échos d’un monde qui n’était pas le leur. Même, un petit rire intérieur soulevait imperceptiblement leur lèvre, à l’idée qu’ils iraient au bal, eux aussi, plus tard, dans les salons officiels, lorsqu’ils pourraient s’offrir le luxe d’un habit, si toutefois cela pouvait servir à leur avancement dans la carrière. Puis, brusquement, ils s’éloignaient, ceux-ci avec un effarement gauche, ceux-là avec une carrure ironique, et rentraient vite chez eux pour