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LES FEMMES DU PÈRE LEFÈVRE.

cerait qu’après minuit, le père Brun l’offrait lui-même, et pour rien ; on le défrayerait seulement de son gaz : une soixantaine de francs ! les soupers et consommations devant se régler comptant… L’orchestre ? ce n’était pas une difficulté : d’abord, fit observer un Bas-Alpin, on pouvait parfaitement s’en passer : Rocca de Nice, qui louait un piano au mois, prêterait son talent et son Pleyel ; d’ailleurs, ajoutait l’aîné des Jouvin, n’avait-on pas l’orchestre du café-concert ! pour quelques bocks et une pièce de quarante sous par tête, ces quatre pauvres diables de musiciens du « beuglant » racleraient toute la nuit des quadrilles…

— Et les femmes ? s’écria tout à coup Mauve, de Toulon… Vous n’oubliez qu’un détail, Coqs organisateurs… Où trouverons-nous des femmes ?

Les visages s’allongèrent. Il y eut une minute de consternation silencieuse. Puis, Mengar, le créole, à demi-voix, comme au sortir d’un rêve :

— S’il est question d’un bal, il faudrait, en effet, quelques femmes…

Comment trouver quelques femmes ?… Les ouvrières et grisettes de la ville ? Il n’en viendrait que si on les invitait avec leurs cousins ou leurs frères. Autant ne pas donner de bal !… Il y avait bien la troupe théâtrale. Mais la jeune première, collée à un banquier retiré des affaires, ne viendrait sans doute pas ; l’ingénue était sur le point d’accoucher ; la première soubrette détestait les étudiants qui l’avaient