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lui-même, regrettant la Provence et son enfance si libre, pensant à chaque instant à ses anciens amis. « Ah ! si Baille seulement était, ici ! Si je pouvais causer de cela avec Cézanne ! » D’ailleurs, il ne travaillait pas. Ni devoirs ni leçons, rien : un cancre ! Lui, toujours le premier au collège d’Aix, c’est à peine s’il daignait encore « composer, » et, dans une classe, à la vérité très nombreuse, il n’était plus maintenant que quinzième ou vingtième. Excepté pourtant en narration française. Là, il était second, il était premier.

Un jour, le sujet de la narration donnée était celui-ci : Milton aveugle, dictant à sa fille aînée, tandis que sa seconde fille joue de la harpe. J’ignore quelles fioritures de style dut broder le jeune lycéen sur ce thème académique. Mais le professeur, M. Levasseur, aujourd’hui membre de l’Académie des Sciences morales et politiques, fut si enchanté qu’il lut la narration devant toute la classe, et fit solennellement la prédiction à l’élève Zola d’un talent futur.

Si l’élève Zola ne « s’appliquait » qu’en narration française, il lisait, en revanche, beaucoup. Dans ces classes des lycées de Paris, où chaque professeur fait son cours à des cinquante élèves échelonnés sur des gradins en amphithéâtre, l’attention et l’assiduité sont, nécessairement, facultatives. Écoute le professeur et suit la classe, qui veut. Lui, écoutait Hugo, Musset, Rabelais et Montaigne ! Ces professeurs