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La matière m’enchaîne, et, si l’âme parfois
T’adore, sans vouloir saisir tes saintes lois,
La raison se révolte et, pour te reconnaître,
Veut comprendre avant tout l’essence de ton être,
Puis, devant cette nuit dont tu nous entouras,
Se trouble, cherche encore, et ne s’incline pas.

Mais, silence ! j’entends une voix de l’espace.
Dieu parle. N’est-ce pas sa réponse qui passe ?

« Créature éplorée, — a dit le chant divin, —
Cœur dévoré d’amour, quelle est donc ta folie ?
Ah ! laisse cette ardeur qui brûle dans ton sein,
S’épancher en prière, en sublime harmonie !

« Laisse, comme un encens qui fume sur l’autel,
Ton âme s’élever vers la voûte sacrée,
Et, sans s’inquiéter de la terre et du ciel,
Monter dans son élan vers sa source ignorée.

« Qu’importe que ton Dieu soit un fils du chaos,
Ou qu’il ait accouché la matière endormie !
Qu’importe ce mélange et de biens et de maux,
Où semble s’égarer la Sagesse infinie !

« Qu’importent les humains et leur infirmité,
Le ciel et sa grandeur insondable et muette !
Qu’importe l’effrayante et morne obscurité,
Quand la raison contemple en toi l’âme inquiète !