Je suive un long sentier que borde l’aubépine,
De sentir sous mes pas frissonner ta poitrine,
Comme un sein maternel tremble d’un long frisson
Au baiser altéré du jeune nourrisson.
On m’a dit que souvent, ô ma blanche Provence,
Tu cherchais des grands bois le frais et le silence,
Et que sur le gazon, sommeillant à demi,
Tu te couchais durant les ardeurs de midi.
Les satyres, cachés sous l’épaisse ramure,
Te contemplent de loin, l’œil brillant de luxure,
Caressant du regard ton front large et vermeil
Où viennent se jouer les feux de ton soleil,
Et ta gorge puissante où la brise de l’onde
Fait flotter au hasard la chevelure blonde.
D’arbre en arbre, vers toi, glisse un divin enfant.
Retenant son haleine, il se penche, écoutant
Les souffles de ta lèvre et, d’une main tremblante,
Écarte ta ceinture et ta robe flottante.
Quand le voile est tombé sous ses doigts amoureux,
Frémissant, d’un baiser il t’éveille, et tous deux,
Lui le dieu des forêts, toi la blonde déesse,
Des cieux vous échangez la féconde caresse.
Ô mère, tes amours ont l’éternel printemps,
Et c’est toujours d’un dieu que naissent tes enfants !
Mais, hélas ! vers midi, la déesse lascive
Ne s’est jamais pour moi, sur l’odorante rive,
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