Page:Alexandri - Les Doïnas, 1855.djvu/41

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

« Allons, mon intrépide, passe à l’autre bord ! » Ainsi la jeune fille parle à son coursier ; mais le coursier s’arrête, fixe les yeux à terre et renifle en frémissant.

« Allons, ami, je t’en conjure, au nom du Seigneur Dieu, allons retrouver mon bien-aimé, car il y a si longtemps que mon âme gémit de son absence !… Allons, mon brave coursier, sois sans peur ! »

Le cheval hennit tristement et se lance dans le ruisseau… Hélas ! souvent l’eau est aussi cruelle qu’une bête fauve… La malheureuse Maghiare disparaît dans les flots et son cheval seul reparaît à l’autre bord.

Quand les rayons de l’aurore brillèrent à l’horizon, ils éclairèrent le corps de la jeune fille gisant parmi les fleurs du rivage blanchi par l’écume. Depuis lors, le ruisseau porte dans le monde le nom de la noble Maghiare[1].




VI

LES TROIS ARCHERS

OU L’AUTEL DU MONASTÈRE DE PUTNA


Le prince Étienne, ce grand héros qui a jeté la terre parmi les païens, veut aujourd’hui élever un mo-

  1. Ce ruisseau des Carpathes s’appelle Maghiarnitza.