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vrez-moi de ces souffrances ! Poignarde-moi, toi, tu es le plus jeune ; aie pitié de moi ! délivre-moi des douleurs qui me déchirent ! poignarde-moi ! dit le malade en s’adressant à Stroïtsch.

— Non, je ne souillerai pas mon vaillant poignard dans le sang impur d’un tyran tel que toi. »

Les douleurs augmentèrent ; le malheureux se débattait dans les convulsions.

« Oh ! mon âme brûle ! de l’eau ! de l’eau !

— Voici, dit Spanciok prenant sur la table la coupe d’argent ; il reste encore la lie du poison : bois, et rafraîchis-toi.

— Non, non ! je ne veux pas ! dit le malade en serrant les dents. »

Stroïtsch se jeta alors sur lui et le tint ferme, tandis que Spanciok, dégaînant son poignard, lui desserrait les dents avec la pointe et versait dans sa bouche le poison resté au fond de la coupe.

Lapuchneano mugissant comme un taureau qui voit la hache prête à le frapper, voulut se retourner la face contre le mur.

— Quoi ! tu ne veux plus nous voir ? dirent les boyards. Non, il faut, pour ta punition, que tu nous regardes. Apprends à mourir, toi qui sus si bien donner la mort ! »

Et tous deux le tenant ferme, attachaient sur lui leurs regards fixes, en l’apostrophant des plus amers reproches.

L’infortuné prince se débattait dans les spasmes de l’agonie ; sa bouche écumait, ses dents claquaient, ses yeux, injectés de sang, devenaient hagards ; une sueur