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« Qu’on nous livre Motzok ! nous voulons la tête de Motzok !

— Malheur, malheur à moi ! s’écria alors le lâche. Sainte Vierge ! ne m’abandonnez pas, je suis perdu ! Quel mal leur ai-je donc fait, à ces gens-là ? Vierge Marie, sauvez-moi de ce péril, et je jure de vous faire bâtir une église, de passer le reste de mes jours dans le jeûne, de monter en argent votre image miraculeuse qui est au monastère de Neamtzo. Et vous, Monseigneur, tout-puissant Seigneur ! n’écoutez pas ces rustres, ces vilains ; faites tirer sur eux ; qu’ils meurent tous. Je suis un grand boyard, moi ; eux ne sont que des vilains.

— Vilains, oui, mais nombreux, répondit Lapuchneano avec un grand sang-froid. Tuer un si grand nombre d’hommes pour un seul, ne serait-ce pas commettre un grand péché ? Je t’en fais juge toi-même. Va donc mourir pour le bien de la patrie, ainsi que tu t’en vantais lorsque tu vins me dire que le peuple ne me voulait pas et ne m’aimait pas. Je suis charmé que ce soit lui qui se charge aujourd’hui de te payer les services que tu m’as rendus autrefois, alors que tu vendis mes troupes à Antoine Sekeli, et m’abandonnas pour passer dans les rangs de Tomche.

— Infortuné ! infortuné ! s’écria Motzok en s’arrachant la barbe, car il comprit aux paroles du tyran qu’il n’y avait plus de salut pour lui. Du moins, accordez-moi le temps de faire mes dernières dispositions ; ayez pitié de ma femme et de mes enfants ; laissez-moi aller me confesser. »

Et il pleurait, il se lamentait, il sanglotait.

« Assez ! lui cria Lapuchneano, ne te lamente pas