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neano, qui se les était attachés à prix d’argent. Quant aux troupes moldaves, elles étaient toutes commandées par ses créatures ; encore avait-il eu soin de les reléguer sur les frontières, après en avoir licencié le plus grand nombre.

Un jour, au sortir d’un long entretien avec Motzok, qui était rentré en faveur auprès de lui, et qui venait de lui soumettre le plan d’une nouvelle contribution, Lapuchneano se promenait seul dans une salle de son palais. Le prince paraissait soucieux, agité ; il se parlait à lui-même, et, à l’air sombre de son visage, il était aisé de voir qu’il méditait dans son esprit quelque projet sinistre, lorsqu’une porte latérale s’ouvrit tout à coup et laissa entrer la princesse Roxandre.

À la mort de son père, le bon Pierre Rareche, qui fut enterré, dit la chronique, au milieu du deuil et de la désolation générale, au monastère de Robota, qu’il avait bâti, Roxandre, encore enfant, resta orpheline sous la tutelle de ses deux frères Iliache et Stefan. Iliache succéda le premier à son père, et, après un règne de quelques jours, consumés dans les plus viles débauches, il se rendit à Constantinople, où il embrassa l’islamisme. Son frère Stefan, qui occupa le trône après lui, montra une dépravation encore plus grande. Il commença par forcer tous les étrangers, les catholiques surtout, à abjurer leur religion ; de sorte que plusieurs familles riches, qui s’étaient établies dans le pays, furent contraintes d’émigrer. Il fut ainsi cause de l’appauvrissement du pays et de la ruine du commerce. La plupart des boyards, qui avaient des liens de parenté avec les Polonais et les Hongrois, mécontents de la conduite du prince, se liguèrent avec les boyards émigrés et déci-