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et pardonnez à ceux qui vous ont offensé ; épargnez, Seigneur, votre infortunée patrie ; licenciez ces troupes païennes ; avancez avec les seuls Moldaves qui composent votre suite ; non-seulement nous vous jurons qu’il ne sera pas touché à un cheveu de votre tête, mais nous promettons même, le cas échéant, de prendre les armes, nous, nos femmes et nos enfants, et de les faire prendre à nos domestiques et à nos serfs ; fiez-vous à notre promesse.

— Que je me fie à vous ? répondit Lapuchneano, qui devina la pensée secrète de Motzok. Crois-tu donc que j’aie oublié le proverbe moldave : « Le loup change de poil, mais jamais de naturel ? » Crois-tu que je ne sache pas ce que vaut la parole des boyards, la tienne en particulier ? Aurais-je oublié par exemple, que, commandant en chef de mes troupes, tu m’abandonnas à la première défaite ? Veveritze est mon ennemi de longue date ; lui, du moins, ne dissimula jamais son inimitié, Spanciok est jeune encore, dans son âme brûle le plus pur et le plus ardent amour pour la patrie ; j’aime en lui cette superbe audace qu’il ne se donna jamais la peine de cacher. Quant à Stroïtsch, c’est un enfant qui commence à peine à vivre et qui n’a pas eu le temps d’apprendre ce que c’est que la fausseté ou le mensonge ; il croit que tous les oiseaux qui volent sont bons à manger. Mais toi, Motzok, vieilli dans le mal, habitué à ramper devant tous les princes ; toi qui as trahi Despote, qui m’as trahi moi-même, toi qui es prêt à trahir maintenant Tomche, dis, ne serais-je pas un sot dont tu rirais bien le premier si je me fiais à toi ? Ah ! tu as cru que tu pourrais encore une fois me tromper ? C’est bien ; je te pardonne d’avoir pu le penser, et je te pro-