pulaires de la Roumanie. Les paysans des Carpathes, qui sont les vrais bardes roumains, chantent ces ballades sur un air lent et plaintif, avec un mouvement musical tout à fait irrégulier, en traînant les notes du chant et en pressant les notes d’agrément. L’expression de mélancolie vague dont ces airs sont empreints est tel qu’on ne les oublie pas une fois qu’on les a entendus.
Châteaubriand remarque que partout le chant naturel de l’homme est triste, alors même qu’il exprime la joie. Ce caractère s’observe surtout dans les pays de plaines. Le chant de la montagne est plus vif, plus varié ; l’homme se sent moins isolé, parce que son horizon est plus borné, et que l’espace dans lequel il se meut est plus circonscrit. Le chant de la plaine est plus grave et plus solennel dans sa monotonie ; ces horizons indéfinis, sans limites, portent à l’âme une impression de tristesse vague comme celle que produit la contemplation de la mer. N’est-ce point en effet la mer, moins ses agitations et ses tempêtes ?
Nous avons déjà parlé des doïnas à propos des poésies originales publiées par Alexandri. Ce sont de petites pièces de vers qui tiennent de la chanson des trouvères quand elle est tendre, et du lieder des Allemands. Le poëte lui-même nous y montre des chants d’amour, d’indépendance et de nationalité. La doïna est inspirée par le doru, ce sentiment indéfinissable qui tient en même temps du regret,