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« Enfant de Serbe pauvre, ton mourgo n’est-il pas un cheval du Boudjiak ? s’il est à vendre, je me porte acquéreur et je consens à te le payer au poids de l’or.


— Mon mourgo n’est ni à vendre ni à échanger, car c’est un brave rejeton des Zméï, et il court aussi promptement que les désirs de mon âme. »


La nièce du sultan, la fille du khan des Tatares, cachée derrière une fenêtre grillée du sérail, l’entend et lui dit :


— Enfant de Serbe pauvre, tu es beau et tu me plais. Approche de la fenêtre ; je veux te donner de ma main autant d’uzluks 57 qu’il t’en faudra pour soigner comme il faut ton cheval et le ferrer avec des fers en argent, propices pour la course ; car sais-tu, frère ? chez nous c’est aujourd’hui mercredi et demain jeudi ; demain les Osmanlis doivent se rendre à la plaine de Haïdar-Pacha 58 pour lutter ensemble à la bague, et le khan, mon père, a résolu d’accorder ma main au vainqueur.


— Puisque je te plais et que je te suis cher, demain, mon cheval et moi nous nous lancerons dans la plaine de Haïdar comme un tourbillon, et la victoire sera à nous.


— Enfant de Serbe pauvre, tu me plais et je t’aime ; mais, hélas ! j’ai grand’peur de l’eunuque du harem ; c’est un nègre aux lèvres épaisses et à la tête couverte d’écailles de poisson. Il possède un jeune coursier qui n’a point encore vu la lumière du soleil depuis que sa mère l’a mis au monde 59.


— En quel endroit le tient-il caché ?