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tôme qui venait à lui à travers champs ; c’était une vieille édentée, bête venimeuse, ayant la peau collée sur les os et portant des serpents entrelacés dans ses cheveux en désordre.

Elle venait, frère, elle venait comme la foudre, et l’herbe se fanait derrière elle, et les hommes tombaient morts et des milliers de plantes épineuses poussaient sur ses traces.


« Bon voyage, dit-elle à Vilkou ; où vas-tu ainsi hardiment, mon beau voyageur ?


— Au diable la vieille édentée, répond Vilkou ; où cours-tu rapidement ainsi ?


— Je vais à la maison de Vilkou, sur les bords du Pruth, pour ravir le reste des jours de ce brave.


— Ô toi ! fléau voyageur, fléau cruel et exterminateur, tiens, prends mon cheval ainsi que mes armes et accorde-moi quelques jours encore pour que je puisse revoir mes enfants qui me sont chers comme la lumière du soleil ; tiens, prends aussi mon chariot et mes bœufs, prends tout et va-t-en de chez nous.


— Qu’ai-je besoin de tes faibles armes quand je possède les armes de l’enfer ? J’ai trois faux invisibles qui fauchent les hommes par centaines et milliers… Qu’ai-je besoin aussi de ton cheval quand je possède le coursier de Satan, lequel ne s’arrête jamais dans son vol et jamais ne se fatigue ? Garde ton chariot, garde tes bœufs… Ce que je veux, ce sont tes jours, et je les prends. »


Soudain la vieille allonge les vieux os de ses maigres