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CHAPITRE XIII.


Le malheureux vicaire était en ce moment à faire un chyle qui tournait à l’aigre dans la pénible digestion d’un dîner grignoté sans appétit et sans pain frais ; et il se demandait, plein d’inquiétude, comment finirait cet orage, bien éloigné cependant de penser qu’il dût venir tomber si épouvantablement sur sa tête. Quelque brave homme, qui se trouvait dans la foule, courut à toutes jambes pour la devancer et aller donner avis à la maison menacée de l’imminence du péril. Les domestiques, que déjà le bruit avait attirés sur la porte, regardaient tout effrayés le long de la rue, vers le côté d’où ce bruit venait et s’approchait. Pendant qu’ils écoutent ce que leur dit l’homme, ils voient paraître l’avant-garde ; l’un aussitôt se précipite pour porter l’avis à son maître ; tandis que celui-ci songe à fuir et en cherche le moyen, un autre vient dire qu’il n’en a plus le temps. À peine les domestiques en ont-ils assez pour fermer la porte. Ils mettent la barre, ils mettent des étais, ils courent fermer les fenêtres, comme lorsqu’on voit arriver un temps bien noir et qu’on attend la grêle d’un moment à l’autre. La furieuse clameur toujours plus forte, venant d’en haut comme un tonnerre, retentit dans le vide de la cour ; elle gronde par chaque ouverture ; et, du milieu de l’immense et confuse rumeur, se font entendre, violents et précipités, les coups de pierre contre la porte.

« Le vicaire ! le tyran ! l’affameur ! nous le voulons ! mort ou vif ! »