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jours, et vous ne serez pas étonnée si je dors mal. Si quelque chose peut me consoler, c’est de penser que je ne déplais pas au Roi ; il a eu la bonté de s’expliquer là-dessus de la manière la plus obligeante avec différentes personnes de qui je le tiens.

« Nous avons ici à dîner le prince royal de Prusse, le jeune prince Henry, frère du prince royal, que le Roi me paraît aimer beaucoup, et qui a, dit-on, beaucoup d’esprit ; je ne l’ai pas vu assez longtemps pour en juger ; nos dîners sont un peu froids, parce que le Roi y admet beaucoup de ministres, de conseillers, de généraux ; les soupers sont plus gais, ou du moins d’une conversation plus animée, et le Roi me paraît ne s’y pas ennuyer ; il est vrai pourtant que sans Milord Maréchal et moi (car le marquis d’Argens est resté à Potsdam) on y garderait le silence comme au réfectoire de la Trappe, car tous ces autres messieurs ne disent mot et se contentent de rire quelquefois des contes que nous faisons. On dit que nous resterons deux jours à Potsdam, où il faut toujours m’adresser vos lettres…

« J’oublie de vous dire que la Reine de Prusse, qui est à Schönhausen à deux lieues d’ici, m’a fait dire qu’elle désirerait beaucoup de me voir et que j’aurai l’honneur d’aller lui faire ma cour dès que le Roi voudra bien me le permettre. Je crois même que je serai obligé de passer quelques jours à Berlin, où il y a beaucoup de choses et quelques personnes dignes d’être vues. Vous