On dit toujours que nous allons incessamment à Berlin, mais on ne dit pas le jour précisément ; il serait possible que ce fût demain et je le voudrais, parce que le lendemain j’irai à l’Académie, où je veux et dois me présenter…
« L’ouvrage et les livres que j’ai apportés ici me sont d’une grande ressource, car excepté le Roi qui ne paraît guère qu’aux heures du dîner et du souper et à celles de la promenade, il y a ici peu de société. J’imagine que M. le président Hénault[1] aura reçu la lettre où je lui ai parlé du Roi et de ce qu’il m’a dit à son sujet ; le Roi fait beaucoup de cas de son livre et m’en parlait encore hier ; il voudrait seulement qu’il ne l’augmentât pas davantage et que d’un abrégé il ne finît pas par faire une histoire ; il préfère la première édition aux suivantes. »
Le séjour à Sans-Souci offrait peu de distrac-
- ↑ Hénault (Charles-Jean-François) (1685-1770) a joué un grand rôle dans la société littéraire du dix-huitième siècle. Reçu conseiller au parlement en 1706, il devint président en la première chambre aux enquêtes en 1710. Il eut une liaison célèbre avec Mme du Deffand ; quand il mourut cependant la vieille aveugle déclara n’avoir perdu qu’une connaissance. Le président avait fait paraître en 1744 un abrégé chronologique de l’histoire de France, abrégé qui fut fort apprécié, puisque huit éditions successives parurent du vivant de l’auteur. Mais à chaque nouveau tirage on faisait des additions, et c’est ce que Frédéric blâmait, non sans raison.