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JO VOISINE.

— Beth, c’est la petite fille aux joues roses, qui reste beaucoup à la maison et sort quelquefois avec un petit panier ? demanda Laurie avec intérêt.

— Oui, c’est elle. C’est ma petite fille, à moi ; nous avons chacune la nôtre, Meg et moi. Beth est gentille comme pas une.

— La jolie, c’est Meg, et celle qui a des cheveux bouclés est Amy, je crois ?

— Comment le savez-vous ? »

Laurie rougit, mais répondit franchement :

« Vous savez, je vous entends souvent vous appeler quand vous jouez dans le jardin, et, lorsque je suis seul ici, je ne peux pas m’empêcher de regarder chez vous ; vous paraissez toujours tant vous amuser ! Je vous demande pardon de mon indiscrétion, mais je ne vois pas que ce qui se passe dans le jardin. Comme votre maison fait presque face à la nôtre, les jours où vous oubliez de baisser les rideaux de la fenêtre, celle où sont placées les fleurs, je vous vois encore dès que la lampe est allumée : cela me fait alors l’effet d’un tableau. Vous êtes toutes autour de la table, votre mère est juste devant moi, et cela me paraît si agréable de voir vos figures contentes à travers les fleurs, que je ne puis m’empêcher de regarder. Je suis orphelin ! »

Cela dit, Laurie se mit à remuer le feu, afin que Jo ne vît pas le tremblement nerveux de ses lèvres qu’il ne pouvait comprimer.

Son air triste alla droit au cœur de Jo ; elle avait été si simplement élevée qu’à son âge elle était aussi franche qu’une enfant de dix ans. Voyant Laurie solitaire et malade, et sentant combien elle était plus que lui riche en bonheur et en affections, elle essaya de partager ses trésors avec lui. Sa figure brune avait une