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ROSE ET PHŒBÉ.

tomber une à une sur une magnifique robe de mariée en satin blanc. Le splendide trousseau fut relégué dans un carton, et personne ne parla de le continuer.

Après un grand conciliabule, les deux tantes, comme dernière ressource, imaginèrent de donner à leur nièce, pour l’amuser et lui tenir compagnie une petite fille du voisinage nommée Ariane Blish, citée partout comme un modèle. Ce fut encore pis : après le départ d’Ariane, Rose déclara que cette petite fille, qui ne remuait pas, qui ne parlait pas, qui se tenait bien droite sur sa chaise en répétant : oui, madame, non madame, ou merci, madame, ressemblait à s’y méprendre à une poupée, à une personne de cire, et qu’elle, Rose, avait failli la pincer, pour voir si quelque chose pouvait la faire sortir de son calme ou si son corps était bourré de son.

Cette fois, les grand’tantes abandonnèrent la partie et laissèrent Rose à ses propres ressources pendant trois ou quatre jours.

Il pleuvait presque continuellement, et Rose, très enrhumée, ne pouvait sortir. La plus grande partie de son temps se passait dans la bibliothèque, où l’on avait déposé les livres qui lui venaient de son père. Là, elle s’étendait sur un des sofas, pleurait un peu, lisait beaucoup et rêvait encore plus. C’était peut-être plus amusant pour elle, mais à coup sûr c’était mauvais pour sa santé. Elle devenait chaque jour plus pâle, plus maigre et plus énervée ; elle ne mangeait plus. Tante Patience avait beau l’embrasser et la consoler, et tante Prudence lui faire prendre du fer et du vin de quinquina, rien n’y faisait.