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Rose s’arrêta, incapable de continuer.

« Si je ne veux pas quoi ? demanda son cousin.

— Si vous ne voulez pas… devenir aveugle !

— Le docteur n’a pas pu dire cela, s’écria Mac ; c’est pour m’obliger à me soigner.

— Hélas ! je le voudrais, fit Rose, mais ce n’est que trop vrai. Oh ! mon pauvre Mac, ajouta-t-elle en pleurant, je sais combien cette crainte est épouvantable, mais vous ne pouvez l’ignorer. Et puis, ne l’oubliez pas, cet affreux malheur n’arrivera que si vous n’êtes pas raisonnable ; autrement, le docteur répond de vous. C’est une grande épreuve, mais nous vous aiderons tous à la supporter, moi la première. »

Elle se tut, car il était évident que Mac ne l’écoutait pas. Ce terrible mot d’aveugle l’avait anéanti. Il semblait changé en statue, et Rose, terrifiée, désolée, brûlant d’envie de consoler son cousin, mais ne sachant comment s’y prendre, n’osait bouger de sa place. Tout à coup elle entendit un sanglot étouffé... Mac pleurait ; c’était bien naturel, mais ses yeux malades allaient s’enflammer davantage.

Jetant au loin l’Histoire de la Révolution française, Rose alla s’agenouiller auprès de la chaise longue ; elle prit les deux mains de Mac dans les siennes, et, pleurant plus fort que lui, s’écria tendrement :

« Je vous en supplie, Mac, mon cher Mac, ne pleurez plus ; vous me faites et vous vous faites mal !... Ne restez pas ainsi appuyé sur ce coussin ; laissez-moi baigner votre front ; il est brûlant, cela vous soulagera un peu !…