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m’oblige à avouer qu’il n’est pas facile de déraciner une mauvaise habitude. C’est pour cela qu’il faut toujours en prendre de bonnes !

— Pauvre cher oncle, dit Rose, vous avez préféré le bien de vos neveux à votre propre agrément.

— Le sage n’a-t-il pas dit : « Il est indispensable d’agir selon sa conscience, mais il n’est pas indispensable d’être heureux. »

— Alors, reprit Rose après un moment de silence, un véritable sacrifice est une action qu’on fait à son détriment pour une personne que l’on aime mieux que soi-même ? Autrement dit, le dévouement consiste à préférer le bonheur des autres au sien propre ?

— C’est cela même.

— Et il ne faut en attendre ni éloges, ni remerciements ? continua Rose avec une ardeur singulière.

— Oui, ma chérie. Vous trouverez plus d’une fois dans votre vie l’occasion de vous sacrifier pour les uns et les autres, et j’espère que vous saurez le faire, car on éprouve plus de bonheur à donner qu’à recevoir... Mais il se fait tard, et vous allez avoir froid en restant immobile. En attendant de plus grands sacrifices, faites-moi celui de vous recoucher et de tâcher de dormir ; sinon, vous serez malade demain, et vos tantes diront que c’est à cause de notre idée saugrenue de camper en plein air, ajouta le docteur en riant.

— N’ayez pas peur, mon oncle, je ne serai pas malade, s’écria Rose. Je ne voudrais pas vous faire repentir de m’avoir procuré tant de plaisir ! »