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L’HÔPITAL NUMÉRO 2.

noirs qui, en effet, ressemblaient assez à d’énormes araignées, et qui auraient agacé bien vite des malades plus âgés et plus raisonnables que Jane.

Jane était couchée sur la chaise longue prêtée par le docteur, qui pouvait à volonté s’élever ou s’abaisser ; mais l’enfant, toujours étendue tout de son long, avait à peine gagné quelques centimètres. Un oreiller de crin excessivement mince était tout ce qu’elle pouvait supporter sous sa tête. Ce jour-là, l’ennui l’avait endormie. Elle était bien jolie ainsi, avec ses longs cils noirs formant une ombre sur ses joues rougies par la fièvre, et ses cheveux bouclés cachant à demi sa figure appuyée contre sa petite main. On eût dit une fleur exotique dans cette triste chambre.

Plusieurs petits détails prouvaient combien elle avait de goût et de sentiment artistique : un ruban rouge relevait ses cheveux ; un châle aux vives couleurs, quoique fané, couvrait son lit ; et tous les cadeaux qu’on lui avait faits depuis sa maladie étaient soigneusement rangés sur une table auprès d’elle, côte à côte avec les rares bijoux qu’elle possédait. Il y avait quelque chose de si pathétique dans ces efforts d’enfant pour embellir sa pauvre demeure, que Mme Minot en fut touchée jusqu’aux larmes.

« Courage, chère madame Peck ! lui dit-elle en lui tendant la main. Il faudra nous aider mutuellement pendant ce temps d’épreuves.

— Ah ! madame, avec des amis comme vous je ne devrais pas avoir le droit de me plaindre ; mais j’ai le cœur brisé de voir la vie de ma pauvre Jane gâtée peut-être à jamais !