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JACK ET JANE

billon de terre et de neige, apparurent en un amas confus au milieu de la route, comme au fond d’un précipice. Deux cris perçants, suivis d’un silence de mort, conclurent la catastrophe.

« J’en étais sûr, s’écria Joë de son poste d’observation, et il cria à pleins poumons : Tombés ! Venez ! venez ! »

On eût dit un corbeau croassant sur le champ de bataille après la défaite.

Tous les enfants accoururent, prêts à rire ou à pleurer suivant le cas, car il est bien rare que dans ces parties de plaisir et même dans les glissades les mieux organisées, il n’arrive pas quelques petits accidents quelquefois gais, mais quelquefois aussi assez graves.

Jack était étendu tout étourdi sur le chemin ; il avait au front une grande plaie qui saignait d’une manière effrayante.

« Il est tué, il est mort ! s’écria Suzanne, en se cachant la figure dans son tablier.

— Pas tout à fait, murmura Jack en fermant les yeux et faisant un grand effort pour se relever sur le coude ; ce n’est rien du tout, ajouta-t-il, cela se passera quand j’aurai retrouvé ma respiration, mais.., qu’est-il arrivé à Jane ? »

Ses camarades s’écartèrent et il put voir sa compagne d’infortune couchée sur la neige, immobile et blanche comme une petite statue. Elle semblait comme stupéfiée, on ne lui voyait pas cependant de blessure apparente, et, lorsqu’on lui demanda si elle était morte, elle répondit d’un air égaré :

« Je ne crois pas. Jack est-il blessé ?

— Il s’est cassé la tête, » dit Joë en lui montrant le