Page:Albert Mathiez - Le dix août - Hachette 1934.pdf/88

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
LE DIX AOÛT

mardi 17 à l’effet de délibérer sur un projet d’adresse à l’armée. La grande objection des Brissotins contre la déchéance, c’était que cette mesure inconstitutionnelle ne serait pas acceptée par l’armée et que celle-ci se soulèverait à la voix de Lafayette si on avait l’imprudence d’y recourir. Les révolutionnaires entendaient répondre à l’argument girondin. La consultation de la Commune tourna en leur faveur. Les commissaires nommés par les sections qui se réunirent à l’Hôtel de Ville, le 23 juillet, choisirent, pour rédiger l’adresse à l’armée, Tallien, Collot d’Herbois et Audouin, trois dirigeants des sociétés fraternelles, et ce qui sortit de leur plume fut un réquisitoire contre Lafayette et contre le roi.

Sur l’initiative de la Fontaine de Grenelle, la municipalité convoqua de nouveau les sections pour le 24 à l’effet de délibérer sur une adresse à l’assemblée. Les Commissaires, qui délibérèrent à l’Hôtel de Ville les 26, 28, 29 juillet, 1er, 2 et 3 août, adoptèrent le texte de la fameuse pétition pour la déchéance que Petion, en leur nom, présenta le 3 août. Ce n’était pas seulement un acte d’accusation contre Louis XVI, « premier anneau de la chaîne contre-révolutionnaire », mais une répudiation de la dynastie elle-même. Elle dénonçait « ce despotisme héréditaire, s’accroissant de règne en règne avec la misère du peuple, les finances entièrement ruinées par Louis XVI et par ses prédécesseurs ; des traités infâmes pour l’honneur national, les éternels ennemis de la France devenant ses allés et ses maîtres ». L’esprit montagnard s’affirmait dans la demande de la déchéance — et non de la suspension — et de la réunion immédiate d’une Convention.