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LES FÉDÉRÉS

le diner, Fournier et Barbaroux exposèrent leurs plans au commandant Moisson et à son second Garnier. D’après Fournier, on se serait mis d’accord pour marcher le lendemain sur le château, s’emparer du roi et de sa famille. D’après Barbaroux, on se serait borné à camper dans les Tuileries, bloquées avec l’aide des faubourgs, et on aurait invité l’Assemblée à sauver la Patrie. Fournier, accompagné de deux Marseillais, aurait vu Santerre le soir même pour le mettre au courant. Santerre aurait promis son concours ainsi qu’Alexandre et Lazowski. Barbaroux prétend que Santerre devait se rendre au-devant des Marseillais le lendemain avec 40  000 hommes, mais il manqua de parole. Il ne vint sur la route de Charenton que 200 gardes nationaux, la plupart Fédérés. Santerre attendit les Marseillais à l’entrée du faubourg. Les Jacobins, au nombre d’un millier, les attendirent sur la place de la Bastille. Le peintre Wille, qui était présent, à consigné dans son journal l’entrée impressionnante du bataillon de Marseille : « Tambour battant, drapeau déployé sur lequel étaient ces mots : Marseille, liberté ou la mort. Au milieu il y avait un fort sur un rocher et au bas du drapeau des canons et des mortiers. » Chaumette remarque que le drapeau était surmonté du bonnet rouge, « signe jusqu’alors inconnu à nos bataillons de Paris, encore bataillons bourgeois, réunis sous les drapeaux aux chiffres de Lafayette, au buste de Henri IV et presque tous parsemés de fleurs de lys et de couronnes ». Wille ajoute que les Marseillais « avaient bonne mine et la démarche fière ». « Il me semble encore les voir, dit Chaumette, avec leurs figures martiales et basanées marchant serrés les uns contre les autres, répondant à notre accueil aux cris de Vive