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LES FÉDÉRÉS

dénoncer à l’Assemblée Anthoine et Robespierre pour les faire envoyer devant la Haute Cour. Indigné de leur langage, le député de Bellegarde déchira sa carte d’entrée au club. Anthoine porta aux Jacobins une dénonciation en règle contre Brissot et demanda sa radiation qu’il ne put obtenir. Il exhorta du moins les Fédérés de rester à Paris « parce que c’est à Paris qu’existe le directoire qui gouverne Coblentz ». Mais ce n’est pas assez, ajoutait-il, que les Fédérés exigent la déchéance, « le roi déchu, nous avons son fils, et, par conséquent, un régent de sa famille. Or, la grande source de nos maux, c’est que, contradictoirement aux principes posés dans la Constitution, nous avons placé à notre tête une famille contre laquelle nous avons fait la Révolution. » Donc plus de Bourbonsi « À la déchéance de Louis XVI, il faut ajouter celle de sa famille. »

À Robespierre non plus la déchéance ne suffisait pas. L’Assemblée ne lui inspirait aucune confiance. « La principale cause de nos maux, disait-il dans cette même séance du 29 juillet, est à la fois dans le pouvoir exécutif et dans la législature, dans le pouvoir exécutif qui veut perdre l’État et dans la législature qui ne peut pas ou qui ne veut pas le sauver. » L’Assemblée n’avait pas osé punir Lafayette, elle avait livré la France au despotisme militaire. « Il faut donc régénérer à la fois le pouvoir exécutif et la législature. » Réfutant Brissot, Robespierre assurait que les assemblées primaires ne seraient pas dominées par les aristocrates et les amis des Prussiens. « Où chercherez-vous donc l’amour de la patrie et la volonté générale, si ce n’est dans le peuple lui-même ? » Il voulait que la nation tout entière, sans distinction de citoyens actifs et de citoyens