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LES FÉDÉRÉS

de tout accident à leurs personnes et leurs propriétés. On devait, après la prise du château, s’emparer de la personne du roi et lui donner comme prison le château de Vincennes. Pour émouvoir le peuple, on répandit des bruits faux qu’il existait des dépôts d’armes aux Tuileries et que Chabot et Merlin de Thionville venaient d’être assassinés par les chevaliers du poignard.

Mais Petion, qui secondait, de tout cœur, les dernières négociations de Brissot et de Vergniaud avec la Cour, ft échouer l’insurrection. Il parut au banquet vers minuit, reprit le thème développé dans Le Patriote français de la veille, dit aux assistants qu’on leur tendait un piège, que l’émeute était désirée par la Cour qui avait préparé la résistance. Il recommença les mêmes homélies au faubourg Saint-Marceau avec le même succès. Les Fédérés, qui avaient sonné le tocsin au faubourg Saint-Antoine et battu la générale, s’étaient rassemblés vers cinq heures du matin. Plusieurs bataillons s’étaient mis sous les armes avec leurs canons. Petion accourut encore pour les dissuader. Peu à peu tout rentra dans l’ordre. Le maire reçut les félicitations du Département feuillantin et du ministre de l’Intérieur. Il se vantera, après le 10 août, d’avoir empêché une insurrection prématurée, vouée, dit-il, à un échec certain. Il faut dire d’ailleurs que Petion semble avoir eu dans le directoire secret des agents à lui. Le sieur Carra, qui en faisait partie, n’écrivit-il pas, dans son numéro du 28 juillet, que le banquet civique « s’était fait avec la plus parfaite tranquillité, malgré les efforts de quelques émissaires du cabinet autrichien qui, sous l’apparence du patriotisme, cherchaient à profiter de ce rassemblement