Page:Albert Mathiez - Le dix août - Hachette 1934.pdf/64

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
LE DIX AOÛT

fayettistes atterrés voulaient douter de l’authenticité du manifeste. L’Indicateur lui-même s’étonnait de la dureté et de l’arrogance de ses expressions et invitait le roi à se proclamer hautement le défenseur et le soutien de l’indépendance nationale. Il lui conseillait encore d’accepter les offres de Lafayette et de quitter Paris sous sa protection : « Y a-t-il rien d’aussi étonnant que le courage du roi de rester à Paris malgré tous les dangers dont il est entouré et les desseins bien connus de ceux qui ameutent le peuple ? Cela est admirable sans doute, mais tout ce qui est admirable n’est pas pour cela utile. »

Cette fois encore Adrien Duport était l’écho de Lafayette qui avait tenté une ultime démarche pour décider Louis XVI à se réfugier dans son armée ou tout au moins à quitter Paris. Les principaux Feuillants, Montmorin, Bertrand de Moleville, Clermont-Tonnerre, Lally-Tollendal, Malouet, dans une réunion qui dura trois heures, le 4 août, projetèrent de faire sortir le roi à tout prix, sous une escorte de Suisses et de gardes nationaux dévoués. Le duc de la Rochefoucauld-Liancourt avait offert de venir de Rouen au-devant du roi. Lafayette avait promis aussi son concours. Montmorin, Lally pressèrent Louis XVI qui les renvoya d’abord à ses ministres Bigot de Sainte-Croix et Dubouchage qui avaient, de leur côté, réfléchi à la question. Le candide Dubouchage avait remis au roi un mémoire où il lui conseillait de demander à l’Assemblée de lui désigner une ville de France où il se rendrait seul, laissant sa famille à Paris. Dans la ville désignée, il convoquerait une nouvelle Constituante qui reviserait la Constitution et, en même temps, il inviterait l’ennemi à arrêter