Page:Albert Mathiez - Le dix août - Hachette 1934.pdf/58

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
LE DIX AOÛT

compatriote, le ministre Terrier, de se loger dans son hôtel, etc., n’étaient pas plus de quelques centaines. D’un état fourni par la mairie de Paris à la date du 18 juillet, il résulte que sur les 2 900 fédérés qui s’étaient fait inscrire à la mairie, 2 000 étaient partis pour le camp de Soissons. Il n’y en avait donc que 900 en résidence dans la capitale.

Le ministre de la Justice Déjoly aurait voulu que le roi se rendit à la cérémonie dans les rangs de l’Assemblée nationale. Le roi s’y refusa. On lui avait fait craindre un attentat. Il s’entoura d’une escorte imposante de gendarmerie, de gardes suisses et de grenadiers et alla se poster à l’Ecole militaire d’où il ne sortit que pour prêter serment sur la première plate-forme de l’autel de la Patrie, n’ayant pas pu accéder au sommet dont s’étaient emparés les fédérés. Dans sa précipitation il oublia de mettre le feu à l’arbre de la Féodalité, qui fut brülé par la main de quelques députés avec les croix, les écussons héraldiques, les casques, les cordons qui pendaient à ses branches. Petion fut le héros du jour. Sur leurs chapeaux les assistants avaient écrit à la craie : Vive Petion ! On cria beaucoup : Vive la Nation ! À bas Lafayette ! Lafayette à la guillotine ! Les cris de : Vive le Roi ! furent rares.

Une feuille aristocrate, le Journal général de France, fit remarquer que les Sans-Culottes occupèrent dans la fête une place exagérée : « Aucun arrangement, aucun ordre, aucune dignité, les habits gris mêlés avec les habits bleus, les piques froissant les bayonnettes, des femmes armées de sabres marchant au milieu des grenadiers, des enfants, des vieillards, des filles, des prêtres en habit ecclésiastique portant des bandoulières et des