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LE DIX AOÛT

conduite suspecte dans leurs fonctions. Les administrations départementales fayettistes, encore nombreuses, protestèrent contre l’odieux attentat dont avait failli être victime « le représentant héréditaire de la Nation ». Le département de la Somme offrit de protéger le roi au moyen de ses gardes nationales qu’il alerta. Une pétition royaliste, déposée chez les notaires de Paris, se couvrit de 20 000 signatures. Lafayette lui-même ne manqua pas de saisir l’occasion pour essayer d’imposer au roi ses services et de tirer vengeance de ses adversaires jacobins. Le 28 juin, il se présenta inopinément à la barre de l’Assemblée, demanda la punition des auteurs du 20 juin et conclut à la prompte fermeture des clubs. Sa popularité était encore telle que, malgré les efforts des Girondins, il fut acclamé par la majorité. Une motion de Guadet, qui tendait à interroger le ministre de la Guerre sur le congé qu’il avait dû accorder au général pour lui permettre de quitter son armée, fut repoussée par 339 voix contre 234. Lafayette était bien résolu à ne pas quitter Paris avant d’avoir réalisé son coup d’Etat. Il avait passé une partie de la nuit, du 27 au 28, chez Lally-Tollendal. Il y réunit ses principaux partisans : La Rochefoucauld, président du Département, les députés Théodore Lameth et Jaucourt, l’ex-constituant Moreau de Saint-Merry, etc. Il leur proposa d’appeler tous les propriétaires parisiens à se réunir sur la place publique autour d’un étendard portant ces mots : « Point de Jacobins ! point de Coblentz ! » Il devait ensuite entraîner cette foule sur le club des Jacobins, saisir leurs papiers, arrêter leurs chefs et raser leur local. Mais les membres du Département et les députés repoussèrent son plan. Il en changea. Il pro-