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LE VETO


victoire de l’ennemi. Le décret du 27 mai 1792 permit de déporter hors du royaume, sur la plainte de 20 citoyens actifs, les prêtres réfractaires perturbateurs.

La Constitution avait stipulé que le roi aurait une garde payée sur les fonds de la liste civile et formée de 1200 cavaliers et de 600 fantassins. Le député Basire, dans un rapport bourré de faits, dénonça l’incivisme de cette garde qui se réjouissait de nos défaites et conspirait avec les émigrés. L’Assemblée, après un véhément débat, vota, le 29 mai, le licenciement de la garde et traduisit son chef, le duc de Cossé-Brissac, devant la Haute Cour. Le 4 juin enfin, le ministre de la Guerre Servan vint proposer, sous prétexte de défendre Paris, d’appeler pour la Fédération du 14 juillet, cinq gardes nationaux fédérés par canton avec lesquels on formerait un camp au nord de la ville. Le projet, légèrement amendé, fut voté quatre jours plus tard. Ainsi les Girondins auraient le moyen de surveiller Lafayette et son armée.

Ils ne doutaient pas que les trois décrets seraient sanctionnés, car leurs amis qui siégeaient au ministère refuseraient à Louis XVI de contresigner son veto au cas où il eût eu l’idée de s’en servir. Et, en effet, tous les ministres refusèrent leur contreseing à la lettre qu’il avait préparée pour notifier à l’Assemblée son refus de licencier sa garde. Il dut exécuter le décret la rage au cœur. Mais ce fut la dernière victoire des Brissotins.

Si Louis XVI avait cédé, au mois de mars, à la pression menaçante exercée sur lui et sur la reine, s’il avait livré Delessart à la Haute Cour et appelé dans son Conseil des bonnets rouges, c’est qu’alors les Brissotins marchaient encore la main dans la main avec les Fayettistes.

Maintenant la situation est renversée. Lafayette et