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L’INSURRECTION

au maréchal de camp d’Hervilly pour ordonner aux Suisses de cesser le feu.

Quand tout fut consommé et le château conquis, le pouvoir révolutionnaire des commissaires des sections, qui avaient préparé et assuré la victoire, fit son apparition à la barre et dicta ses volontés par la bouche de son président Huguenim, la veille simple commis aux barrières. « Le peuple, dit Huguenin, qui nous envoie vers vous, nous a chargés de vous déclarer qu’il vous investissait de nouveau de sa confiance, mais il nous a chargés en même temps de vous déclarer qu’il ne pouvait reconnaître, pour juge des mesures extraordinaires auxquelles la nécessité et la résistance à l’oppression l’ont porté, que le peuple français, votre souverain et le nôtre, réuni dans ses assemblées primaires. » Guadet, qui présidait alors, fit la grimace à ce langage impérieux, car la convocation des assemblées primaires, c’était l’acte de décès de la Législative. Il répondit en termes vagues que les représentants du peuple maintiendraient jusqu’à la mort la liberté et l’égalité, puis il conseilla aux pétitionnaires de rappeler le peuple au calme, à l’obéissance, « afin que l’Assemblée nationale ne puisse jamais être accusée d’avoir porté aucune de ses délibérations dans le trouble et dans la violence ». La précaution n’était pas inutile, mais il était trop tard. La Gironde dut subir ce qu’elle n’avait pu empêcher.

Le même Vergniaud, qui avait repoussé la déchéance, six jours plus tôt, avec indignation, proposa, au nom de la Commission extraordinaire, de suspendre le roi, de convoquer une Convention qui serait élue, sans condition de cens, au suffrage universel, mais, contrairement au vœu de Robespierre, au suffrage universel