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LE DIX AOÛT

y eut un moment de grande panique. Les fuyards déferlaient par les rues avoisinantes jusqu’à l’Hôtel de Ville. La Commune insurrectionnelle se hâta de rassembler des renforts. Elle en demanda jusqu’aux villes voisines, par exemple à Sèvres : « L’assemblée générale conjure, au nom de la Patrie, au nom de ce que la fraternité a de plus cher, nos frères, les citoyens de Sèvres et leurs circonvoisins, de nous envoyer sur-le-champ le plus de forces possible. Le Carrousel est couvert de cadavres de patriotes. Aux armes, à nous, citoyens ! » Panis et Sergent griffonnèrent ce billet : « De la poudre ! De la poudre ! pour différents détachements à la mairie… Rien de si pressé que cette poudre et qu’on nous dise en quelles mains elle est maintenant à l’Arsenal pour qu’au nom de la Commune nous y envoyions directement. » Le bruit courut un instant que les Suisses étaient victorieux. Du côté du jardin des Tuileries ils avaient fait une sortie sous la conduite du capitaine de Salis et s’étaient emparés de trois canons.

Mais la ferme conduite des Marseillais et des Brestois et du faubourg Saint-Marceau, l’arrivée des troupes de Santerre au moment critique, le passage des gendarmes à l’insurrection décidèrent du succès de celle-ci.

Les canonniers de Marseille arrêtèrent l’élan des Suisses sur le Carrousel par des coups de mitraille qui les décimèrent. Durler resté presque seul dut rentrer dans la cour royale. C’était le moment où les troupes du faubourg Antoine, amenées par Alexandre, se présentaient enfin par la rue Nicaise. Elles mirent aussitôt leurs canons en batterie et renforcèrent le feu des Marseillais et du faubourg Saint-Marceau. Déjà la gendarmerie à cheval avait quitté le Petit Carrousel pour charger les Suisses