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LE DIX AOÛT

force que Petion lui avait ordonné de renforcer les postes du château. Les commissaires étonnés décidèrent sur-le-champ d’envoyer au maire des commissaires pour recueillir ses éclaircissements. Un peu plus tard ils chargèrent Santerre de consigner Petion à la mairie, distincte de l’Hôtel de Ville et située sur l’emplacement actuel de la Préfecture de Police, sous une garde de 600 hommes, soi-disant destinée à sa protection. Petion se prêta d’abord de bonne grâce à cette consigne qui mettait sa responsabilité à l’abri. Il prétendra même plus tard qu’il écrivit plusieurs fois à la Maison Commune pour en presser l’exécution. Mais, sitôt que l’émeute fut victorieuse, Petion s’empressa d’avertir l’Assemblée qu’il était « gardé et retenu ». Ses amis firent voter un décret qui levait la consigne. Mais la Commune révolutionnaire ne se pressa nullement d’exécuter le décret. Elle lui gardait rancune de ses efforts répétés pour empêcher l’insurrection et, plus encore, de l’ordre qu’il avait donné à Mandat de renforcer la garnison des Tuileries. Elle ne savait pas tout. Elle ignorait que Petion avait donné, le 8 août, un réquisitoire au commandant de la garde suisse, d’Erlach, pour renforcer de 400 hommes la garde du château.

On dit souvent que l’arrestation et l’assassinat de Mandat désorganisèrent la défense et furent la raison principale du succès de l’insurrection. Il ne faut pas exagérer ce point de vue. Même si Mandat était resté à son poste au château, on ne voit pas ce qu’il aurait pu faire de plus. Il n’avait plus aucune action sur les sections soulevées. Il avait gardé les ponts sur la Seine : Pont-Royal, Pont-Neuf, Pont Saint-Michel, pour empêcher la jonction des faubourgs. La Chesnaye ne changea rien à ses dispositions. Le commandant de la garde nationale