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La France et Rome de 1700 à 1715

pureté, et c’est pour abolir cette pureté même, odieuse et offensante, que jésuites, roi, courtisans et pape se sont coalisés contre la maison des Champs. Le quiétisme, efféminé par essence, était tombé dès le début, avec le P. Lacombe dans la mollesse et la dépravation. La Rome des cardinaux fastueux et débauchés dictait à l’univers des principes de vertu et d’honneur que, toute la première, elle n’observait plus. Et le catholicisme, par mille fissures, suait la corruption, le luxe et l'impudicité, tout en continuant de prêcher les vertus évangéliques. Seul, au milieu de ces fanges, le jansénisme reste debout, jusqu’au jour lamentable où il versera dans l’aberration hallucinée des convulsions Partout ailleurs, en cet âge troublé, la femme contamine l'idée religieuse. Madame Guyon déshonore Molinos, et Marie Alacoque ridiculise Molina, tandis que les vierges de Port-Royal, — depuis la première abbesse, qui réforma la communauté, jusqu’à la mère Anastasie du Mesnil, qui ne cède qu’à la, main militaire, — ont toutes conservé une mémoire immaculée et contraint leurs ennemis à l’admiration et au respect. Ces femmes sont des saintes. Leur âme est exigeante et fière, leur foi simple et stoïque. Le jansénisme est une religion chaste, au-dessus, trop au-dessus peut-être de la commune humanité. En vain les jésuites ont épluché, sondé dans tous les sens, insidieusement interrogé l’histoire de Port-Royal, le siècle entier qui se déroule de Saint-Cyran à la mort de Quesnel (1719) : ils n’en ont pas tiré un atome de scandale.

Cependant qu’on prépare au Vatican des foudres impitoyables, qu’on y tremble de voir ressusciter quelque monastère d’où sortirait un nouvel Arnauld ou un second Pascal, qu’on refuse cruellement la vie