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LOUIS XIV DEMANDE UNE BULLE 389

Pour endurer plus longtemps un auteur Qui de vos droits est Te perturbateur.

Le pape accueille Philotanus, comme il faisait le cardinal de la Trémoille, avec force gémissements :

Je le sens bien, répligua Clément onze En larmoyant^ et n’ai le cœur de bronze. Lorsque je vois régner de tels abus ; Mais faut souffrir, père Philotanus : C’est hasarder que de faire une bulle ; Et je crains fort qu’en France, sans scrupule. Mon nom flétri, mes sentiments bernés, On la renvoie avec un pied de nez .

Ce digne jésuite, dont nous avons rencontré le congénère, — mais en bonne prose, — dans les Provinciales ^ ne reste pas court d’arguments :

Ne craignez rien ; Tai parole absolue

Du grand Louis ; raffaire est résolue

Entre nous deux. Je dispose à mon gré

De son esprit, par le moyen sacré

Du tribunal où, quand je le confesse,

J’en obtiens tout, pour peu que je le presse ;

Si vous doutez de ma sincérité.

Je me fais fort qu’à Votre Sainteté

Il écrira lettre formelle et vive

Pour vous prier que cette bulle arrive ;

En vous jurant qu’à son premier aspect

Elle sera reçue avec respect.

— En ce cas-là, dit-il, c est autre chose.

L’entretien continue sur ce ton en vers assez médiocres, et le disciple d’Escobar finit par persuader au pape que non seulement la France est dans l’attente anxieuse de sa bulle, mais que le Portugal, l’Espagne, l’Italie, l’Allemagne et les Flandres la recevront avec joie et vénération.

Voilà le seul élément de gaieté, — et combien mince f — que nous fournisse la naissance de VUnigenitus. Les jansénistes se gaussent des molinistes, qui leur rendent la pareille ; mais tout cela vous a un air guindé, béat et faux, de plaisanteries écloses