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La nuit, muet témoin, vit Edmond disparaître.
Il n’était pas sorti quand brilla le matin.
Certes, c’est, à coup sûr, une chose commune
Que tous ces amoureux au balcon suspendus,
Et l’histoire en serait sans succès, si la lune
Racontait le roman de tous ceux qu’elle a vus.
Ce que je crois plus rare en ces jours de blasphème
Où tant d’amours légers n’ont plus de souvenir,
C’est d’aimer noblement la femme qui vous aime,
Et de savoir surtout lui garder l’avenir.
Or Edmond, à genoux aux pieds de son amante,
Lui disait ses ennuis et lui parlait d’espoir,
Et jurait que sa voix serait toujours aimante
Lorsque dans une année il viendrait la revoir.
Car demain même, au jour, il devait quitter Rome
Et rejoindre à Paris et sa mère et sa sœur.
Étant pour sa Nella dans l’âge où l’on est homme,
Il allait pour tous deux demander le bonheur.
« Ô Nella, disait-il, je suis jeune et fidèle ;
Ceux qui n’ont pas souffert ont un cœur plus aimant ;
Le bonheur à mes vœux ne fut jamais rebelle,
Et je t’aime à mourir, comme on aime un enfant.
Je reviendrai. Le temps volera plus rapide
Qu’il ne s’est écoulé dans nos longues amours.
Quand mon œil reverra ton œil noir et timide,
Si Dieu nous réunit, ce sera pour toujours… »