Page:Alanic - Les Roses refleurissent.pdf/234

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Que d’acquisitions inappréciables, en ces quelques jours ! Estelle croyait porter en elle-même une âme plus grande et comme magnifiée, pour jamais exhaussée au delà des choses vulgaires.

À Bâle, elle avait connu le grand Holbein, rude et sincère. À Lugano, lui était apparu pour la conquérir aussitôt, Luini, le tendre et ineffable Luini, qu’elle retrouvait avec bonheur à Côme et à Milan, où triomphait aussi le divin Léonard. Et à Venise, éblouissante apothéose : Tintoret, Titien, Véronèse, Tiepolo… Mais ces virtuoses somptueux la touchaient moins que leur vieux maître Bellini.

— Voyez, disait-elle, sur le bateau même, en touchant le bras de son mari, voyez cette femme qui vient de s’asseoir en face de notre banc, son enfant sur les genoux. N’est-ce pas tout à fait l’attitude, l’expression suave et recueillie de la Vierge de l’Académie, entre sainte Catherine et la Madeleine ?

— En effet, ce fut le mérite des peintres italiens d’avoir su saisir et fixer la vie. Il faut dire que la race leur offrait des modèles de choix.

Mais en cherchant de l’œil la Madone et le Bambino, le regard de Vincent tombait sur deux jeunes gens, perdus dans une contemplation réciproque et adorative.

— Nos voyageurs de Vérone, chuchota Estelle,