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grands navires, aux noms étrangers, dorment comme des bêtes assoupies ; un vaisseau de guerre étage ses tourelles ; des felouques, aux voiles fauves, parlent de l’Orient. Et voici que les voyageurs retrouvent le tableau prestigieux qu’ils ne se lassent pas d’admirer, depuis quatre jours. À leur gauche, San-Giorgio dresse sa vaste coupole, muette à présent, où ne résonnent plus les beaux chants bénédictins, et écoute, nostalgique et humilié, les bruits de la caserne voisine et le murmure des eaux qui baisent ses degrés de marbre. Au fond, l’entrée du Grand-Canal, la Dogana, Santa-Maria della Salute, tant de fois décrites par d’amoureux pinceaux.

À droite, lentement, défile la perspective glorieuse et émouvante : le quai des Esclavons, le pont de la Paille et celui des Soupirs, enjambant de son arche couverte le rio sinistre, puis la masse puissante du Palais Ducal, enjolivé d’arcatures mauresques et de créneaux effilés, les colonnes triomphales du Môle, Saint-Marc et ses cinq dômes, le svelte campanile…

Une fois de plus, les deux voyageurs se laissent emporter, par le Grand-Canal, jusqu’à Santa-Chiara, d’où ils redescendront à San-Marco. Qui se rassasierait de ce décor de rêve, évoquant un passé inouï de magnificence, d’art épanoui et de souveraineté ?