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Les appels glapissants de la mère Adèle coupèrent cette méditation déprimante. La brave femme, la nuit tombée, venait tenir compagnie à sa jeune voisine. Estelle s’efforça de secouer son accablement, sans y réussir. L’heure, en cheminant, apportait d’autres craintes. Quel effet aurait sur Adrien la fâcheuse nouvelle ?

La soirée était assez avancée quand le jeune homme rentra. Excité par la causerie, les fins repas, le plaisir musical, l’artiste s’était encore grisé des premiers compliments que lui valait son œuvre. Les thèmes de l’ouverture et de l’apparition avaient été fort goûtés. M. Marcenat, retenu encore au chef-lieu par ses devoirs d’avocat, avait pu assister à l’audition. Il approuvait l’idée de Mélusine, mais sans partager l’avis de sa femme quant à l’exécution. Le conseiller général affirmait que les jeunes gens du pays donneraient une interprétation plus homogène et plus attentive, plus naïve et plus savoureuse que des amateurs mondains, insoumis, inexacts, qui cherchent chacun à tirer l’effet à soi. Là-dessus, comme si ce propos la visait personnellement, Mme Marcenat s’était rebiffée, griffes dehors, comme une jolie chatte en courroux hérissée devant un dogue. L’incident avait été court, mais significatif, dénotant la mésintelligence absolue du ménage.