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CHAPITRE IX

DEUX LANGAGES

Les formes édifiées, sculptées, peintes ou dessinées signifient toujours quelque chose. Elles sont les caractères d’une écriture universelle ; et chacun les lit sans savoir lire. Belles ou laides, elles racontent. Un grand tombeau signale un mort illustre ; et souvent, par les attributs ou par les scènes sculptées, il fait connaître les travaux, le genre de mort et le genre de gloire. L’arc de triomphe décrit aussi les armes, les victoires, les puissances. Cette porte ouverte des deux côtés sur le monde invite aux aventures et aux conquêtes sans fin ; mais le vide qui est au centre de l’œuvre représente énergiquement aussi ce qui reste de la force, un passage. La pyramide met en forme la chute d’une grande chose, et la prépondérance de la loi inférieure ; mais, par la pointe et les arêtes, elle nous garde d’oublier ce qu’elle efface ; c’est le tombeau de l’esprit. Les tableaux peints nous instruisent du costume, des mœurs, du cérémonial. Certes il reste toujours à deviner ; mais il y a ample suffisance en cette apparence fixée ; tout est dit en cette mince surface, de même que des milliers de théorèmes sont en ce cercle nu. Le dessin le plus simple offre un sens que jamais aucun discours n’épuisera. De même un plan fait connaître un édi-