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CHAPITRE VIII

DE LA CARICATURE

Il y a des ridicules qui viennent de timidité, dans la marche, dans l’attitude, dans le costume, dans la coupe de la chevelure, de la barbe, de la moustache. Et il y a une imitation facile de ces choses, qui donne aussitôt la ressemblance. Faisons attention aussi que ces apparences offrent souvent une expression assez frappante, et qui trompe ; non pas toujours sur l’humeur, car chacun joue son personnage, mais sur le fond de nature, qui s’exprime d’autre façon. La laideur, comme la rougeur, se montre en voulant se cacher. Ainsi on reconnaît mal parce que l’on connaît mal. L’artiste efface d’abord ces apparences, et déjà par l’exactitude du dessin, car un grand nez n’est jamais si grand, ni un petit front si petit ; bref, il est peu de visages qui ne gagnent à être fidèlement dessinés, sans recherche d’expression ni de ressemblance. Un beau portrait agit d’abord contre ces petites passions qui gâtent la vie familière. Et je crois que principalement les enfants, qui grossissent naturellement ce qui est humeur, voient presque toujours mal leurs parents et leurs maîtres. Or cette mauvaise ressemblance est justement ce que le dessin saisit dès qu’il vise à l’expression, car il n’exprime que par le mouvement et le trait. Aussi cette facilité à saisir, dans