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CHAPITRE V

DU DESSIN COLORIÉ

Le dessin n’appelle nullement la couleur ; sa perfection propre se développe sans rien emprunter à la peinture. Aussi voit-on qu’il n’importe guère que le papier soit blanc, jaune ou bleu, ni que la ligne soit d’encre ou de crayon, noire ou colorée. Ce n’est point que ce genre de contraste ne relève pas du goût et ne puisse plaire plus ou moins. Mais le choix des couleurs dépend du style, non de l’objet. La sanguine, par exemple, ne représente pas mieux le nu que ne ferait le trait noir ; et, de même, un papier bleuâtre convient aussi bien pour le nu qu’un papier couleur de chair. Il ne s’agit que de chercher un assemblage qui plaise à l’œil, et ce n’est qu’une condition secondaire, subordonnée de bien loin à l’aisance, à la netteté, à la force. Et ce retour à la couleur est une négation de la couleur. Aussi, dès que le trait domine la couleur, on retrouve toujours quelque chose de cette fantaisie qui choisit la couleur pour plaire, et non pour peindre. Et c’est par là qu’il faut comprendre le pastel, qui reste toujours dessin par la touche et par la matière. Et il est bien remarquable qu’un portrait au pastel, qui pourrait passer, à la première réflexion, pour une espèce de portrait peint, dans le fait n’y ressemble point du tout. La matière