Page:Alain - Système des Beaux-Arts.djvu/302

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

CHAPITRE VIII

DES SYMBOLES

Une suite de gestes occupe comme un message chiffré, car le loisir manque. Et cette pensée mercenaire fait tout l’équilibre et tout le bonheur du plus grand nombre. C’est pourquoi le loisir même est souvent rempli par des conversations sans retours ni silence. On ne comprendra point cette agitation sans fruit si l’on ne considère les pensées errantes, bientôt informes, et qui rendent la rêverie odieuse à beaucoup. Et telle est la faiblesse du dessin, qui suppose une attention forte et disciplinée ; aux enfants et aux esprits faibles, il faut une suite de dessins, qui occupe à la manière des conversations frivoles. Et disons que la frivolité est une sorte de jugement préalable qui s’interdit de s’arrêter sur rien, par horreur du vide. Or il faut comprendre qu’un geste arrêté, comme aussi une lecture libre, donne naturellement naissance à ces folles associations d’images et de mots qui font haïr presque toujours la liberté de penser. Comment la poésie et l’éloquence et surtout la musique conduisent les esprits faibles et les ramènent d’instant en instant, c’est ce qui a été montré suffisamment. Comment l’écrivain de prose y parvient sans soumettre les signes à la loi du temps et du rythme, cela sera expliqué aussi autant que l’art le