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CHAPITRE PREMIER

DE L’APPARENCE

La sculpture imite le plus réel de l’objet, qui est la forme, dépouillée du mouvement et de la couleur ; ainsi une statue est elle-même une source d’apparences, mais purifiées ; par exemple on peut prendre d’une statue comme d’un monument autant de vues en perspective que l’on voudra ; et les changements de la lumière multiplient encore cette variété des aspects. En quoi la peinture s’oppose à la sculpture, puisqu’elle imite au contraire toute l’apparence d’un moment, traduisant la forme uniquement par le contour sur un plan, la couleur, le clair et l’obscur. Chacun sait que les yeux ne connaissent jamais que des signes de la forme solide, et que voir des formes c’est interpréter des ombres, des profils et des grandeurs relatives. Seulement comme le but est, pour l’ordinaire, de connaître par les yeux la vraie distance, la vraie forme, et même la vraie couleur, ce qui n’est que signe est communément détaché de l’objet ; par exemple au lieu de voir les ombres, on pense le relief, et au lieu d’apprécier les grandeurs relatives d’apparence qui font la perspective, on pense la distance ; on ne voit point un homme diminuer ou grossir, mais bien s’éloigner et se rapprocher ; et per-