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SYSTÈME DES BEAUX-ARTS

que ceux des parades militaires, qui sont comme des danses aussi. Au contraire rien ne s’éloigne plus du vrai langage théâtral que ce souci puéril de varier les gestes et les attitudes, comme font les peintres en leurs tableaux. Car l’art du peintre ne ressemble en rien à cette peinture ou sculpture en mouvement qu’exige le théâtre. Le tableau reste, et l’œil le parcourt ; au lieu que le mouvement théâtral est soumis à la loi du temps, et c’est dans la succession et non dans les parties qu’il exprime la variété. Ces réflexions sont bien aisées à suivre ; mais l’on comprend ici assez clairement que la séparation entre les genres n’a rien d’arbitraire, et répond aux conditions de tout langage. Parler n’est pas crier, écrire n’est pas dessiner, chanter n’est pas gémir ; et remarquons même qu’un moyen d’expression a d’autant plus de puissance qu’il se montre seul et dénudé, comme l’imprimerie, notamment, le fait assez voir. Mais il faut avancer avec ordre en suivant les arts plus abstraits et plus sévères que nous allons rencontrer maintenant. Et c’est sans doute le dessin, le plus pauvre, le plus abstrait de tous, qui nous instruira le mieux. Il n’est pas bon d’anticiper trop, si nous voulons surprendre les secrets du style.