Page:Alain - Propos sur le Bonheur (ed. 1928).djvu/56

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
48
PROPOS SUR LE BONHEUR

l’on souffre. Et ceux qui ont trop pensé à leurs peines, lorsqu’ils les racontent à faire pleurer les autres, ils trouvent encore à cette action un petit soulagement.

Surtout, quels qu’aient pu être les sentiments de ceux qui sont morts, la mort a tout effacé ; avant que nous eussions ouvert notre journal, leur supplice avait pris fin ; ils étaient guéris. Idée familière à tous, qui me fait penser que l’on ne croit pas réellement à une vie après la mort. Mais, dans l’imagination des survivants, les morts ne cessent jamais de mourir.

24 avril 1912.