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LXXXV

PLATON MÉDECIN

Gymnastique et musique étaient les deux grands moyens de Platon médecin. Gymnastique signifie travail modéré des muscles sur eux-mêmes, en vue de les étirer et masser intérieurement selon leur forme. Les muscles souffrants ressemblent à des éponges chargées de poussière ; on nettoie les muscles comme les éponges, en les gonflant de liquide et en les pressant plus d’une fois. Les physiologistes ont assez dit que le cœur est un muscle creux ; mais, puisque les muscles enferment un riche réseau de vaisseaux sanguins, qui sont alternativement comprimés et dilatés par la contraction et le relâchement, on pourrait bien dire aussi que chaque muscle est une sorte de cœur spongieux dont les mouvements, précieuse ressource, peuvent être réglés par volonté. Aussi voit-on que ceux qui ne sont point maîtres de leurs muscles par gymnastique, et que l’on appelle les timides, sentent en eux-mêmes des ondes sanguines déréglées qui se portent vers les parties molles, ce qui fait que tantôt leur visage rougit sans raison, tantôt leur cerveau est envahi par un sang trop pressé, ce qui leur donne de courts délires, tantôt leurs entrailles